La Newsroom
L'actualité c'est chiant. Ici on essaie de rendre ça un peu moins chiant.

Bosser dans une start-up, c’est cool : il y a une bonne ambiance, un billard ou un baby-foot et plein d’autres avantages. Bosser dans une start-up qui a réussi, c’est encore mieux : chez Google par exemple, les employés ont la cantine gratuite, un service de massage, des bus high-tech pour les ramener chez eux… Tout est fait pour que les employés soient heureux et travaillent bien.

Dans la même idée, Apple et Facebook vont même plus (trop?) loin. Les deux géants américains proposent désormais à leurs employées de congeler leurs ovaires (ovocytes pour être précis) afin qu’elles puissent se consacrer à leur carrière. En effet, les deux entreprises aimeraient féminiser leurs équipes.

Mais plus le temps passe, moins une femme est féconde. À partir de 40 ans, la manière naturelle est rarement efficace et il faut en passer par une insémination artificielle. Dorénavant, les employées de Facebook et bientôt celles d’Apple n’auront plus à s’en préoccuper et pourront mettre pleinement leur jeunesse au service de leur employeur.

Facebook couvre d’ores et déjà la congélation d’ovaires à hauteur de 20 000 dollars, alors que l’opération coûte environ 10 000 dollars, puis 500 dollars par an pour la conservation des ovaires. Apple devrait faire de même à partir de janvier prochain.

Aux États-Unis, les réactions sont partagées : certains évoquent une plus grande liberté offerte aux femmes et la réduction des inégalités avec les hommes au travail.  D’autres trouvent cette démarche cynique et critiquent le fait que la vie personnelle soit éclipsée par la vie professionnelle.

Cependant, on ne peut pas reprocher à ces entreprises de chercher à décourager leurs employés d’avoir des enfants : Apple offre par exemple des congés prolongés en cas de naissance et va même jusqu’à rembourser les frais liés à une procédure d’adoption.

On notera enfin qu’aux États-Unis, ce sont les entreprises qui prennent en charge la couverture médicale de leurs employés. En France, la congélation des ovocytes est interdite, sauf pour les femmes qui suivent un traitement risquant de réduire leur fertilité. Pourtant, de nombreux médecins, représentés par le Conseil national des gynécologues et obstétriciens, considèrent que c’est le seul remède efficace à l’infertilité passé 40 ans.

Il n’y a pas de nouveaux cas de contamination en Allemagne, mais un Soudanais employé de l’ONU ayant attrapé le virus Ebola au Liberia vient de décéder à Leipzig, où il était soigné.

C’est le deuxième pays européen où une victime d’Ebola meurt après l’Espagne et les décès de deux missionnaires cet été, et le troisième pays hors d’Afrique si l’on prend en compte le décès de Thomas Duncan aux États-Unis.

En Espagne et aux États-Unis, ces patients ont par ailleurs infecté des membres du personnel médical qui ont eux contaminé leurs proches. Ces faits témoignent de l’extrême difficulté qu’ont les soignants à traiter les victimes d’Ebola comme de la nécessité d’être très vigilant pour éviter la diffusion du virus.

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Carte wikimédia / cliquez pour agrandir

Voici une carte qui résume l’état de propagation de la souche Ebola qui frappe l’Afrique de l’Ouest. L’épidémie a pour l’instant fait plus de 4000 victimes, selon les chiffres officiels, dont plusieurs centaines de médecins. Le personnel de santé au Liberia est même en grève depuis hier et réclame des compensations financières plus importantes.

Si vous voulez savoir pourquoi les chiffres officiels sont bien en-deça de la réalité et pourquoi cette grève est potentiellement catastophique, consultez notre dossier complet Ebola.

Joyeux anniversaire Vladimir Poutine ! - С Днем рождения Владимир Путин !

En ce mardi 7 octobre, le président russe Vladimir Poutine fête ses 62 ans. On a tous des images viriles de l’ancien responsable du KGB en tête. En voici des nouvelles, présentées par la BBC. Inspirées des 12 travaux d’Hercule, elles sont exposées par l’organisation gouvernementale Владимир Путин (Vladimir Poutine, ils se sont pas foulés).

Elles rappellent aussi les plus belles heures de la propagande communiste. Le camarade Poutine, tout en slip en en muscle, affronte l’Occident pour le bien de la mère Russie. Un culte de la personnalité à peine caricatural : des députés du parti Russie Unie ont proposé par exemple de faire du 7 octobre un jour de fête nationale à la mémoire des militaires russes qui ont annexé la Crimée… Une initiative approuvée par le ministre de la Défense, Sergueï Choïgou.

Par ailleurs, c’est aujourd’hui l’anniversaire de la mort de la journaliste et opposante russe Anna Politkovskaïa, abattue il y a huit ans devant chez elle.

La visite commence avec la seule photo potable de la page Facebook. Poutine se bat contre une Hydre qui représente l’UE, le Japon, le Canada et les USA (tête tranchée, cold war style). Bref, les pays qui imposent des sanctions économiques à la Russie pour son implication dans la crise Ukrainienne.

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Les autres photos ont été prises par la BBC sur place :

Toujours dans la référence mythologique, Poutine remplace Atlas et porte sur ses épaules la Russie et ses satellites. On notera la Crimée russe et la colombe.

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Ici c’est le mythe du taureau de Crète qui est revisité : l’animal représente la Crimée (il porte son emblème sur le front) et est dompté par Vladimir à l’aide de rênes made in Russia.

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Poutine dresse également les oligarques russes qui se sont appropriés les réserves pétrolières à la chute de l’URSS. Ils sont ici représentés sous les traits du sanglier d’Érymanthe. Un autre tableau montre Poutine en train de nettoyer les écuries d’Augias – en référence à la corruption dans le pays – mais il est vraiment moche.

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La suite s’éloigne pas mal des références mythologiques. Poutine est cependant toujours en slip et en armure :

Vladimir qui étrangle un terroriste tchétchène. Sa politique envers la région a été déterminante dans son accession au pouvoir.

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Vladimir qui essaye de tirer sur les avions américains ou leurs bombes avec un arc… Sans doute moins efficace qu’un bon veto au conseil de sécurité de l’ONU pour empêcher les Occidentaux d’intervenir en Syrie.

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Vladimir et les Jeux Olympiques de Sotchi, un bel exemple de lutte contre la corruption et d’écologie.

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Enfin, vous trouverez sur le site de la BBC d’autres tableaux représentant Vladimir qui ferme les gazoducs vers l’Europe et les ouvre vers la Chine contre 400 milliards de dollars ou encore Vladimir qui ramène les deux navires de guerre Mistral de France (big up).

Maintenant, si vous songez sérieusement à vous installer en Russie auprès de son grand leader, je vous comprends. L’organisme Vladimir Poutine achèvera d’ailleurs de vous convaincre avec ses nombreuses photos de Vladimir qui aime les animaux.

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Ils vont peut-être un peu loin là

Photo de Une : Pim Stouten

 

Le designer Bredan Dawes a imaginé ce à quoi ressembleraient nos emails s’ils étaient réels et non plus virtuels. Baptisé Six Monkeys, le projet dévoile six objets qui donnent vie à nos messages électroniques et les intègrent à notre environnement quotidien.

Si la démarche est avant tout artistique et philosophique, en montrant comment nous pourrions retranscrire nos interactions virtuelles (oublier sciemment de répondre à un message, dérouler son flux de notifications Twitter ou Facebook, s’envoyer soi-même un email…) sur le plan physique, elle nous laisse imaginer ce que seraient les communications électroniques dans un monde sans écran. Certains de ces objets pourraient toutefois avoir une utilité.

Je pense par exemple à « Lucy », qui vous alerte quand vous recevez un email et change de couleur en fonction du destinataire ou du contenu. Vert, c’est cool, rouge, c’est peut-être votre relevé de compte qui vous rappelle l’autre signification du mot « découvert ». D’autres couleurs pourraient être ajoutées : une fois abonné à la newsletter de Météo France ou aux alertes de l’Equipe par exemple, Lucy indiquerait s’il va pleuvoir aujourd’hui ou si votre club préféré a marqué.

Il y a aussi « Nim », qui vous permet d’enclencher votre flux de messagerie aussi facilement qu’allumer une ampoule, ou « Ham », qui vous permet d’imprimer votre message sur un ticket de caisse avec un truc qui ressemble à un tuyau de douche…

Vous savez sûrement que l’Afrique de l’Ouest connait actuellement la pire épidémie du virus Ebola de l’histoire. Cependant, plusieurs éléments ne sont pas assez mis en avant par la presse grand public selon nous. On vous récapitule tout ce qui s’est passé et que vous devez savoir pour avoir votre propre avis sur ce sujet.

Temps de lecture : 6 minutes

Vous n'avez pas 6 minutes à consacrer à ce sujet important ? On vous pardonne si vous cliquez ici :)

On ne s’étendra pas longtemps sur le traitement médiatique de l’épidémie : certains trouvent que c’est trop, d’autres pas assez. Pour être concis, oui, Ebola n’a fait officiellement « qu’un peu plus » de 3000 morts, et on devrait accorder autant d’importance aux millions de victimes annuelles du paludisme, de la pneumonie et des diarrhées qui sévissent en Afrique. Mais les causes, la réalité et les conséquences de l’épidémie actuelle justifient une telle exposition. Mieux, cette mise en avant devrait également bénéficier à la lutte contre l’horrible liste de maladies que je viens de citer.

Ce qui m’interpelle, c’est plus le ton employé lorsque l’on parle d’Ebola. Je ne sais pas si le fait d’être à l’époque plus jeune a son importance, mais je me souviens de l’angoisse, voire l’hystérie, qui était palpable lorsqu’on évoquait la maladie de la vache folle, la grippe aviaire ou plus récemment la grippe H1N1 dans les médias. Avec Ebola, la presse fait moins dans le sensationnel et l’alarmisme. Par contre, rien ne justifie un traitement aseptisé et superficiel de l’épidémie.

Ebola est bien plus grave que H1N1 et ces autres maladies qui nous effrayaient auparavant.

C’est pourquoi je veux évoquer ici plusieurs points :

  • l’atrocité de cette crise sur le plan humain. Avec le décompte des victimes, c’est l’angle d’attaque le plus courant que j’ai observé. Même Obama l’a évoqué. Il est cependant essentiel pour comprendre la nature de ce qui se trame là-bas.
  • L’enchaînement catastrophique des événements, qui est assez difficile à imaginer si on ne suit pas régulièrement l’actualité.
  • Les graves conséquences de cette épidémie pour les pays touchés, qui ne sont quasiment pas abordées.

La pire épidémie du virus Ebola de l’histoire

Ebola tire son nom d’une rivière de la République Démocratique du Congo, a.k.a Congo-Kinshasa ou Zaïre pour les initiés et les fans de Youssoupha. C’est là qu’a eu lieu la première épidémie en 1976. C’est aussi le théâtre, avec le Soudan, de la plupart des épidémies qui se sont déclarées jusqu’à aujourd’hui. Mieux que des mots, cette infographie réalisée par le site Vox, d’où je tiens pas mal des infos et des chiffres utilisés ici, vous montre bien en quoi cette épidémie est unique :
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Avant 2014, Ebola avait fait environ 1600 victimes officielles. Rien que cette année, selon les derniers chiffres de l’OMS (l’Organisation Mondiale de la Santé, pas l’Office Municipale des Sports) on a franchi le cap des 3300 morts pour près de 7200 cas. On y reviendra, mais ces chiffres ne valent pas grand-chose : la vérité, c’est que personne n’a aucune idée de l’ampleur réelle de l’épidémie qui touche l’Afrique de l’Ouest.

Selon les chiffres officiels donc, l’année 2014 a été deux fois plus meurtrière que les 38 années précédentes. Qu’est-ce qui a changé ? Pas la maladie.

La « fièvre hémorragique » Ebola est une vicieuse, mais c’est toujours la même. Elle se transmet à l’origine via les animaux comme les singes ou les chauves-souris, morts ou vivants. Ses symptômes sont la fatigue, les maux de tête, la fièvre, les douleurs musculaires, les vomissements et la diarrhée. Ils peuvent se déclarer jusqu’à trois semaines après la contamination et leur apparition rend le malade contagieux à son tour. Dans un cas sur deux – où une majorité selon les articles – la victime saigne par le nez, la bouche, les selles… Une extrême déshydratation et la formation de caillots sanguins entraînent la chute de la pression artérielle, l’arrêt d’organes vitaux et la mort. Cela arrive généralement dans les cinq jours après l’apparition des premiers symptômes.

C’était vrai en 1976, ça l’est toujours aujourd’hui pour cette souche particulière du virus. Car un autre foyer d’infection issu d’une souche différente d’Ebola se trouve actuellement au Congo. Il a fait environ 70 victimes mais vient d’être maîtrisé par les autorités.

Voilà, on y est. Ce qui a changé et ce qui est dramatique dans toute cette histoire, c’est qu’Ebola a frappé là où l’on ne s’y attendait pas. D’habitude, lorsqu’une épidémie du virus Ebola se déclare, comme ce fut le cas à proximité du Congo des dizaines de fois (cf infographie), les autorités savent réagir : elles connaissent les symptômes, savent qu’il faut mettre la zone sous quarantaine, répertorier les malades et les accompagner, rechercher les personnes qui ont eu des contacts avec eux et les placer sous observation. Bon, ça ne sauve pas les malades, mais ça évite que l’épidémie ne se propage.

Ebola a frappé au plus mauvais endroit, là où personne ne l’attendait

Ici, les choses sont bien différentes. L’épidémie débute entre décembre 2013 et janvier 2014 à Guéckédou, une localité majeure du sud de la Guinée, proche à la fois du Libéria et du Sierra Leone. Autant dire que les choses ne commencent pas bien : beaucoup de monde y transite et le fait que trois pays soient concernés réduit les chances d’une réponse organisée.

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La région n’a jamais rencontré Ebola, mais elle connaît bien d’autres maladies, comme la grippe et le paludisme. Malheureusement, les mêmes symptômes apparaissent dans les trois situations et les premières victimes sont passées inaperçues. Les médecins ne prennent pas de précautions particulières et sont eux-aussi contaminés. Début mars, les services de santé de Guéckédou alertent les autorités guinéennes et Médecins Sans Frontières (MSF).

Il est alors difficile de se faire une idée de l’ampleur de l’épidémie à cause de la rareté et l’inexpérience des labos locaux et du mauvais état des routes, qui ralentit l’arrivée des échantillons. Il faut passer par des labos européens pour avoir la confirmation qu’Ebola est à l’œuvre. Entre-temps, la maladie peut se développer. Les victimes, qui vont chercher une assistance médicale dans les villes, y transmettent le virus. Lorsqu’Ebola est identifiée, elle est déjà à Conakry, la capitale de la Guinée (2 millions d’habitants).

Contrairement au Congo où elle frappe des villages isolés, Ebola se développe alors dans un univers urbain et surpeuplé. Autre problème, elle est très contagieuse.

En avril puis en mai, l’OMS confirme que l’épidémie s’est propagée au Libéria et en Sierra Leone. Enfin, le 18 juin, l’organisation se réveille et déclare l’état d’urgence. Le nombre de cas a plus que quadruplé et la maladie a déjà fait 500 victimes.

Oui, quelque chose a merdé. L’OMS n’a déclaré l’état d’urgence que cet été, cinq mois après le début de l’épidémie. Deux mois de plus ont été nécessaires pour qu’une intervention internationale se mette en place. Depuis, l’épidémie est hors de contrôle

Pour contenir la maladie, les services de santé doivent être mobilisés dès le départ. Informés et appuyés par les organismes internationaux, le Sénégal et le Nigéria ont réussi à contenir les débuts d’épidémies de cet été.

En Guinée, en Sierra Leone et au Libéria, personne n’était préparé. Pas assez de lits, pas assez d’ambulances, pas assez de matériel de protection pour les secours : au moins 200 médecins sont décédés depuis le début de l’épidémie. C’est dramatique dans une région qui n’en compte environ qu’un pour 6000 habitants.

Cette maladie ne laisse pas de place à la compassion et la population se méfie des secours

Face à la faiblesse du système de santé, les gens ne vont plus consulter et sont soignés par leurs proches. C’est là qu’Ebola montre sa nature profonde : cette maladie est une pute. Désolé d’être cru, mais ce passage est crucial pour comprendre la problématique Ebola. Autant qu’il soit impactant.

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Ebola se transmet par les fluides et les sécrétions des malades. Contrairement à ce que laisse penser le nom « fièvre hémorragique », il n’y a pas que du sang : elle se propage dans le vomi des malades. Dans leur diarrhée. Par le sperme des hommes infectés qui, même sauvés, restent contagieux plusieurs mois. Elle se transmet par la sueur. Elle se transmet par les larmes.

Et Dieu sait que les malades ont toutes les raisons de pleurer. Le taux de mortalité du virus oscille entre 70 et 90% à l’heure actuelle. Une fois que ses symptômes sont déclarés, un malade sait que s’il va à l’hôpital, il a toutes les chances de ne plus jamais revoir les siens et de mourir seul. Nombreux sont ceux qui préfèrent rester chez eux, condamnant par la même occasion leur famille, leurs amis, leurs voisins.

Même sans toucher directement le malade ou son cadavre, il suffit de manipuler un drap ou un verre avec lequel il a été en contact pour être contaminé. Les membres d’une même famille ne peuvent pas établir entre eux le protocole très strict normalement appliqué lors d’une quarantaine. Imaginez que c’est votre mère, votre femme ou votre sœur qui est malade ? Que feriez-vous ? Je ne prends pas ces exemples au hasard : au Libéria, 75% des victimes sont des femmes.

Comme le rappelle Barack Obama, Ebola nous dépouille de notre humanité : « elle change un simple acte d’amour et de compassion envers un proche, comme toucher la main d’un ami ou embrasser son enfant mourant, en acte potentiellement fatal pour vous… »

Pour vaincre Ebola, il ne faudrait pas soigner ses proches, ni même leur dire adieu. Mais c’est impossible quand on sait l’horrible réalité des hôpitaux. La maladie s’est tellement développée que ces derniers sont pleins et ne peuvent plus accueillir de malades. Ils viennent mourir chaque nuit devant le dispensaire de MSF à Monrovia, la capitale du Libéria. Normalement, pour faire baisser le taux de mortalité, il faut hydrater et transfuser les malades, mais il y a pénurie de matériel.

La plupart du temps d’ailleurs, lorsqu’une zone de quarantaine est mise en place, il y a pénurie de tout. Face à la croissance exponentielle du nombre de cas et à la pression des médias et des pays voisins, les autorités ont fait boucler des zones par l’armée sans s’assurer que les stocks de vivres ou de médicaments étaient suffisants. Les conditions de vie dans ces zones se sont dégradées avec l’apparition de la famine et la recrudescence d’autres maladies, alors que les médecins sont concentrés sur Ebola. Selon Joanne Liu, la présidente de MSF, difficile de savoir qui meurt d’Ebola, du paludisme ou d’autre chose.

Bien plus de victimes que les chiffres officiels : seuls 18% des malades sont pris en charge

Des malades préfèrent s’enfuir de ces mouroirs et errent dans la rue, provoquant parfois des mouvements de panique comme cet été sur un marché de Monrovia. J’avais déjà utilisé ce reportage dans un précédent article. Je viens d’ailleurs de remarquer en le matant une nouvelle fois qu’un médecin s’éclate littéralement la gueule à la fin de la vidéo en tombant d’un 4×4.

Moins drôle, la psychose qui règne là-bas pousse la population à se méfier des autorités : un hôpital a été attaqué à Monrovia par la foule qui a jeté les malades dehors en scandant qu’Ebola n’existait pas. En Guinée, une équipe de médecins et de journalistes venue alerter la population sur les risques a été massacrée. L’ignorance et la peur compliquent le travail des équipes chargées de contenir la maladie autant que le manque de moyens.

La plupart des chiffres donnés sur Ebola ne correspondent pas à la réalité. Les 7200 personnes contaminées ne sont que celles prises en charge dans les hôpitaux et les dispensaires. L’American Centers for Disease Control and Prevention (CDC), considère que ce chiffre ne correspond en réalité qu’à 18% des malades… Pour contenir une épidémie, il faudrait qu’au moins 70% des victimes soient prises en charge.

Voilà pourquoi le virus Ebola se développe si vite : selon le New England Journal of Medicine, le nombre de cas double tous les 16 jours en Guinée, tous les 24 jours au Libéria, le pays le plus touché, et tous les 30 jours en Sierra Leone.

Pour l’OMS, qui se base sur les chiffres officiels, 20 000 personnes pourraient être touchées en novembre. Avec les chiffres officieux, on peut facilement atteindre les 100 000 cas. Pour lutter efficacement contre Ebola, un contingent de 20 000 hommes serait nécessaire, de préférence des militaires. Les Américains viennent d’en envoyer 3000. Encore insuffisant.

Dorénavant, certains experts pensent que la réponse ne doit plus seulement être médicale. Le professeur Peter Piot, co-découvreur du virus en 1976, parle d’une crise humanitaire globale : « Désormais, la réponse à la situation ne doit plus être du seul ressort de la médecine. Parallèlement à la militarisation de l’action médicale, il faut élargir la mobilisation internationale et onusienne, inclure le Haut Commissariat aux réfugiés (HCR) et le Programme alimentaire mondial (PAM) » explique-t-il à Slate.fr.

Car désormais, les conséquences sur le long terme pour les trois pays touchés apparaissent. On espère que l’envoi massif de matériel va permettre un meilleur accueil des malades et empêchera la propagation d’autres maladies dans la population saine. Mais il faudra également répondre au défi alimentaire, alors que de nombreux agriculteurs sont morts dans les campagnes et qu’il n’y a pas eu de récolte cette année. Les champs sont laissés en jachère, et rien ne dit qu’ils seront travaillés l’an prochain. Plus généralement, tous les pans de la société sont touchés, de l’économie à l’éducation. Des milliers d’orphelins doivent déjà être pris en charge.

L’Occident doit être vigilant

Dommage, car des pays comme la Sierra Leone (+13,3%) et le Libéria (+8,1%) avaient respectivement la deuxième et la onzième plus forte croissance économique au monde. À défaut d’avoir rapidement été prise en charge, cette épidémie va maintenant coûter très cher si l’on veut que ces pays reprennent le chemin du développement.

Le Nigéria est une véritable plaque tournante pour le transport aérien en Afrique. Le développement de l'épidémie y serait dramatique.
Le Nigéria est une véritable plaque tournante pour le transport aérien en Afrique. Le développement de l’épidémie y serait dramatique.

 

Ebola devrait nous mobiliser pour que des traitements soient développés afin d’endiguer efficacement les maladies qui ravagent l’Afrique. Pendant la quarantaine d’année où elle est restée confinée au Congo ou au Soudan et faisait épisodiquement quelques centaines de morts, les labos ne se sont pas assez intéressés au développement d’un remède. Les recherches coûtent beaucoup d’argent et les investissements ne vont que vers celles ayant des débouchés concrets. Devant l’ampleur du désastre et les premières contaminations d’Occidentaux, c’est maintenant le cas.

Les recherches vont être d’autant plus encouragées que la possibilité de voir Ebola dans les pays développés s’est accrue. Jusqu’ici, l’épidémie avait peu de chances de quitter la zone actuellement touchée : les services de santé des pays frontaliers sont en alerte, les contrôles des passagers quittant le pays sont renforcés et les malades contagieux n’ont pas la force de se déplacer sur de grandes distances. Mais nous ne sommes pas à l’abri d’une défaillance, comme le prouve le cas de Thomas Duncan, à l’origine du premier cas d’Ebola en dehors de l’Afrique.

Venu rendre visite à sa famille au Texas, l’homme n’avait pas indiqué avoir été au contact de gens contaminés lors de son départ de Monrovia le 19 septembre. C’était pourtant le cas. Les premiers symptômes se sont déclarés le 24 septembre. Le lendemain, l’hôpital de Dallas où Thomas vient consulter le renvoie chez ses proches avec de simples antibiotiques. Il y reviendra le 28 septembre dans un état critique, avant que le virus Ebola soit détecté deux jours plus tard. Au total, plus d’une centaine de personnes, dont 20 ont été en contact direct avec Thomas sont sous surveillance : la famille de la victime n’a ni respecté les premières mesures de confinement, ni pris de précautions avec ses affaires.

Ici, l’absence de symptômes avant le départ de Thomas, son ignorance et le manque de vigilance de ses proches et des services hospitaliers américains ont été déterminants. S’il ne faut pas céder à la panique, ce schéma peut toutefois se reproduire si l’épidémie d’Ebola n’est pas plus prise au sérieux. Heureusement, vous connaissez maintenant sérieusement le sujet.

Mise à jour du 07 octobre : le premier cas de transmission d’Ebola en Europe vient d’être confirmé. La victime est une infirmière espagnole qui avait soigné deux de ses compatriotes, des missionnaires infectés alors qu’ils combattaient l’épidémie en Afrique de l’Ouest et rapatriés en Espagne cet été. Bien qu’une extrême vigilance soit apportée au personnel médical qui soigne les malades rapatriés (j’espère que c’est également le cas pour la Française actuellement soignée) le risque qu’Ebola touche l’Europe et plus particulièrement la France est réel. Par ailleurs, le cas de l’infirmière espagnole laisse imaginer la difficulté des équipes qui travaillent en Afrique avec beaucoup moins de moyens.

Mise à jour du 14 octobre : Une infirmière américaine qui soignait Thomas Duncan à Dallas a également contracté le virus. Par ailleurs, un Soudanais employé de l’ONU ayant attrapé le virus Ebola au Liberia vient de décéder à Leipzig (Allemagne), où il était soigné.

C’est le deuxième pays européen où une victime d’Ebola meurt après l’Espagne et les décès de deux missionnaires cet été.

Ce weekend, les mouvements nationalistes et indépendantistes se sont faits remarquer au Royaume-Uni, en France et en Espagne.

Moins de deux semaines après le référendum sur l’indépendance de l’Écosse, qui s’est soldé par la victoire du non, les indépendantistes catalans ne baissent pas les bras et espèrent toujours organiser leur propre référendum.

Artur Mas, le président de la communauté autonome, a signé samedi un décret de convocation d’un référendum sur l’indépendance catalane le 9 novembre prochain.

La Catalogne, c’est 7,5 millions d’habitants et environ 20% du PIB espagnol, soit près de 192 milliards d’euros. Le PIB du Portugal, à titre de comparaison, est d’environ 170 milliards d’euros et celui de l’Écosse, 150 milliards. Mais la Catalogne est aussi la région la plus endettée d’Espagne, du fait de ses contributions au fonctionnement du reste du pays selon les indépendantistes.

Pour Madrid, impossible de se séparer d’un tel joyau. Le gouvernement espagnol a saisi le Tribunal constitutionnel pour faire casser la convocation du référendum. Un refus qui va encore tendre la situation alors qu’1,8 million de Catalans étaient dans la rue début septembre et que l’ERC, le parti de la gauche républicaine favorable à l’indépendance est arrivé en tête aux dernières élections européennes. Comme le FN en France.

Le Front National fait une entrée historique au Sénat

La situation est bien sûr différente, les indépendantistes catalans étant pro-UE. Mais le parallèle avec la France montre bien le repli identitaire qui s’opère actuellement en Europe.

C’était prévisible depuis les élections municipales du printemps : la droite est à nouveau majoritaire au Sénat. En effet, les sénateurs sont élus par des grands électeurs, dont 95% sont issus des conseils municipaux. Le même système explique le basculement de la Chambre haute à gauche en 2011. Et aussi l’entrée historique ce weekend des deux sénateurs FN Stéphane Ravier (Bouches-du-Rhône) et David Rachline (Var), qui est à 26 ans le plus jeune élu de la Haute-Assemblée.

Ces deux derniers sont respectivement maires du 7e arrondissement de Marseille et de Fréjus. Ils comptaient suffisamment de soutiens pour être des candidats sérieux lors des sénatoriales. L’opération séduction lancée auprès des nombreux maires et conseillers municipaux locaux a fait le reste.

L’arrivée du FN au Sénat reste anecdotique sur le plan politique, avec seulement 2 sièges sur 348. Mais elle est avant tout symbolique : le parti frontiste est désormais présent dans les deux chambres législatives et son action de « dédiabolisation » lui permet d’attirer la sympathie de plus de 4000 élus, dont beaucoup ne lui sont pas affiliés.

L’UKIP séduit deux députés conservateurs

On retrouve également ce phénomène outre-Manche. Comme le FN, l’UKIP (United Kingdom Independence Party) milite contre l’UE. Comme le FN, il arrive en tête des dernières élections européennes devant les partis politiques historiques, une première.

Ce weekend, le parti a annoncé l’arrivée en son sein de Mark Reckless, un député conservateur connu pour son euroscepticisme. Début septembre, c’était Doug Carswell, un autre élu tory, qui quittait la formation du Premier ministre David Cameron pour celle des indépendantistes.

À seulement huit mois des élections législatives, ce dernier n’est pas certain de conserver son poste. Face à la pression de l’UKIP et de son propre camp (un tiers des députés conservateurs seraient eurosceptiques), David Cameron a promis, s’il était réélu, d’organiser en 2017 un référendum sur l’avenir du Royaume-Uni au sein de l’Union Européenne…

Crédit photo : Stasiu Tomczak

À Hong Kong comme dans de nombreux pays d’Asie, beaucoup d’habitants portent le masque chirurgical. Mais ici, ce n’est pas de la pollution ou des microbes que l’on se protège, mais des gaz au poivre que fait pleuvoir la police sur les dizaines de milliers de manifestants, qui adoptent du coup le parapluie comme autre moyen de protection.

Le site Appledaily.com a eu la bonne idée de filmer les événements à l’aide d’un drone :

Ces étudiants occupent les rues à proximité du siège du gouvernement local, après avoir réussi à forcer les barrages des forces de sécurité ce weekend. Les manifestants cherchent à faire pression sur l’assemblée législative, qui doit voter au printemps prochain le nouveau mode de désignation du pouvoir exécutif.  Hong Kong, rattaché à la Chine communiste en 1997, bénéficie en effet d’un statut spécial. Pékin a décidé fin août de renforcer son contrôle sur les élections, en limitant le nombre de candidats à un maximum de trois, préalablement validés par un conseil électoral.

Les manifestants, qui devaient à l’origine se rassembler ce 1er octobre, anniversaire de la fondation de la République populaire de Chine, accusent les parlementaires d’avoir prêté allégeance à Pékin. Les étudiants, en grève depuis la semaine dernière, ont décidé de précipiter la confrontation.

Ce weekend, les affrontement les plus violents ont eu lieu et ont fait des dizaines de blessés. Ce lundi, la situation s’est vraisemblablement calmée. Si les manifestants occupent toujours le terrain, la police a cessé ses attaques.

Pékin de son côté n’intervient pas directement mais a décidé de renforcer le contrôle du Web chinois. Le réseau Instagram, particulièrement utilisé par les manifestants à Hong Kong, et ainsi inaccessible dans le reste du pays, afin d’éviter une éventuelle contagion.

Mise à jour : voici une autre vidéo qui vaut le détour !

Photo : @evatam / Wall Street Journal / Twitter

Alors que la Syrie et l’Irak n’ont plus le monopole des guerres ouvertes entre sunnites et chiites – les événements au Yémen sont toutefois plus d’ordre politique que religieux – de plus en plus de témoignages nous parviennent quant à l’organisation de la vie quotidienne au sein de l’État islamique en Irak et au Levant, aussi appelé Daesh.

Des ministères, des tribunaux et même une « autorité de protection des consommateurs »

Interrogé par l’AFP, un habitant de Raqqa, ville pro-Bachar du nord de la Syrie tombée aux mains des djihadistes en avril 2013, raconte comment ces derniers essayent d’organiser les institutions d’un véritable état. L’État islamique a ainsi mis en place dans sa nouvelle capitale des ministères de la Santé, de l’Éducation, de la Défense ou encore des Affaires religieuses. Ils occupent les anciens bâtiments officiels abandonnés. Des tribunaux fonctionnent également, recevant les plaintes et jugeant selon la charia, qui est enseignée aux plus jeunes dans les écoles. Des camps encadrent l’entrainement des adolescents plus âgés

Les installations pétrolières et gazières, ainsi que les centrales électriques et les infrastructures installées sur l’Euphrate sont vitales pour l’avenir du califat et continuent donc à tourner. « Il y a même une autorité de protection des consommateurs » ironise Abou Youssef, un militant opposé à Daesh. Pourtant, le califat ne fait pas de cadeaux à la population d’une ville où Bachar al-Assad avait passé les fêtes de l’Aïd al-Fitr en 2012, après le début du conflit.

Les djihadistes, qui sont les seuls à pouvoir être armés, ont organisé des brigades chargées de faire la police. Il y en a même une composée exclusivement de femmes armées qui ont le droit d’arrêter et de fouiller n’importe quelle femme dans la rue. Là-bas, tout est noir, des drapeaux de l’EIIL aux burqas des femmes, en passant même par les passeports attribués par le califat.

La ville est restée fidèle au régime jusqu'au bout / CC James Gordon
La ville est restée fidèle au régime jusqu’au bout / CC James Gordon

Les djihadistes touchent un salaire minimum de 300 euros par mois

Les habitants n’ont pas le droit de s’installer dans les cafés, réservés aux djihadistes, qui les excluent de la plupart des lieux publics. « Rien de bon ou d’amusant n’est autorisé », témoigne un autre habitant. Il est interdit de fumer ou de vendre du tabac. Une femme ne peut pas sortir sans voile intégral et sans être accompagnée par un homme de sa famille. « Chaque jour, quand le muezzin appelle à la prière, tout le monde ferme sa boutique et va à la mosquée, sous peine de prison », ajoute l’homme.

Les corps crucifiés et les têtes coupées qui ornent certaines places de la ville rappellent le sort de ceux qui s’opposent trop directement à l’EIIL. Enfin, pour asseoir sa domination et financer sa guerre, le califat prélève l’impôt auprès des non-djihadistes : les commerçants doivent ainsi payer 60 euros par mois, ce qui est beaucoup compte tenu de la situation du pays. « Même ceux qui sont trop pauvres pour payer doivent s’y plier » constate un dernier opposant interrogé par l’AFP. Ces derniers n’ont alors souvent pas d’autre choix que de rejoindre les rangs des djihadistes et pratiquent l’extorsion à leur tour.

Cet argent sert notamment à rémunérer les combattants et les fonctionnaires du califat, qui touchent un salaire de base de 300 euros par mois. De quoi pousser d’autres habitants désespérés à les rejoindre. Selon l’International Business Times, les djihadistes de l’État islamique représentent le « groupe terroriste le plus riche du monde ». Outre le racket pratiqué sur les populations locales ou les voyageurs qui traversent leur territoire, qui rapporterait une centaine de millions d’euros par an, l’organisation se finance grâce aux enlèvements et à la contrebande de pétrole et d’antiquités.

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Raqqa et Mossoul sont les principales villes conquises par l’EIIL

Un capital total de 2,3 milliards de dollars

Ils auraient ainsi développé un large réseau d’intermédiaires dans les pays voisins et revendraient du pétrole raffiné clandestinement « entre 25 et 60 dollars le baril, soit bien moins que les 100 dollars qui ont cours sur les marchés mondiaux », affirme Lou’aï al-Khattib, chercheur au Brookings Doha Center, une antenne d’un institut socio-économique américain implanté au Qatar. Selon lui, ces ventes assureraient aux djihadistes une manne financière quotidienne de 2 millions de dollars.

Au total, le budget du califat s’élèverait à 2,3 milliards de dollars, comme le laisse penser des informations retrouvées dans la cache d’un de ses dignitaires. Cet argent permettrait d’entretenir entre 20 000 et 60 000 combattants en Syrie et en Irak selon les sources, dont de nombreux non-syriens issus du Golfe, de Tchétchénie ou d’Asie Centrale. Plusieurs milliers d’occidentaux sont également sur place, venu seuls ou en famille.

 

Le référendum relatif à l’indépendance de l’Écosse vis-à-vis du Royaume-Uni sera, en cas de victoire du Yes, un événement historique majeur : la renaissance d’une nation millénaire et la fin d’un empire.

Le Yes est cependant encore loin de l’avoir emporté. Les premiers sondages qui le donne vainqueur ne datent que de la semaine dernière. Ils témoignent de la force du mouvement qui a réussi à enthousiasmer les Écossais encore indécis, alors que les partisans du non n’ont axé leur campagne que sur des craintes alarmistes pour l’avenir.

Pourtant, l’exemple du Québec, qui avait voté pour l’indépendance en 1995, est significatif : malgré la victoire indépendantiste dans les sondages, le non l’avait emporté de justesse. En Écosse, les trois derniers sondages donnent ainsi le No vainqueur avec 52% des suffrages.

Mais dans tous les cas, les Écossais seront plus autonomes. Devant le risque de cession, les principaux chefs politiques britanniques se sont alliés autour de David Cameron pour leur demander de rester au sein du Royaume-Uni, quitte à bénéficier d’une plus grande liberté politique. Même Barack Obama s’est montré en faveur du No.

Car le départ de l’Écosse serait un vrai coup dur pour le Royaume-Uni, sans parler des éventuelles répercussions à l’échelle de l’Europe et du monde.

Le Royaume-Uni, une puissance en déclin

Cela fait 307 ans que l’Angleterre et l’Écosse sont unies sous les couleurs de l’Union Jack. En plus de la perte du fond bleu de leur drapeau, une cession toucherait directement l’identité des Britanniques : celle de l’Irlande au lendemain de la Première guerre mondiale annonçait la dislocation de l’Empire et la perte définitive de son influence sur le Canada, l’Australie et finalement l’Inde. Difficile pour une nation qui dominait le monde il y a encore un siècle de voir son territoire, amputé de l’Écosse, se réduire à un tiers de la France métropolitaine !

Mais les préoccupations des Britanniques sont bien plus concrètes. Du point de vue économique, l’indépendance priverait le Royaume-Uni de 96% de ses réserves pétrolières et de 52% de ses réserves gazières, qui se trouvent au large de l’Écosse. Soit un manque à gagner évalué entre 22 et 48 milliards d’euros sur les cinq prochaines années, selon les prévisions de Londres et celles, beaucoup plus optimistes, des indépendantistes.

Le secteur de l’énergie n’est pas le seul impacté : le Royaume-Uni pourrait perdre 12% de ses revenus touristiques, tandis que le secteur agroalimentaire serait également touché. Pire, les Britanniques se priveraient de 90 distilleries de Scotch ! Au total, l’indépendance de l’Écosse enlèverait au Royaume-Uni 9,2% de son PIB.

Une rivalité ancestrale
Une rivalité ancestrale

Vers la sortie de l’UE ?

Seul point positif, le Royaume-Uni économiserait 15 milliards d’euros par an en se débarrassant du système de santé écossais. Les répercussions en matière de démographie ont toutefois une importance capitale : les 5 millions d’Écossais, s’ils ont l’un des pires niveaux de santé d’Europe, comptent parmi les populations les plus instruites du continent. 52,8 % d’entre eux ont fait des études supérieures, contre une moyenne de 46,6% pour le reste du Royaume-Uni.

Par ailleurs, les Écossais sont traditionnellement de gauche. La perte de cet électorat, déterminant dans l’alternance des pouvoirs, va totalement redistribuer les cartes en Angleterre. La gauche risque de perdre une quarantaine de députés (sur un total actuel de 258), contre seulement un pour la droite, majoritaire avec 361 députés. Ce revirement à droite va grandement favoriser l’UKIP, le parti nationaliste britannique qui milite pour une sortie de l’Union Européenne…

Si le référendum a d’importantes répercussions, notamment en Espagne auprès des indépendantistes catalans, il pourrait également priver dans quelques années l’UE de l’une de ses capitales économiques.

Quelle place au niveau mondial ?

L’indépendance pourrait enfin menacer la puissance nucléaire britannique, alors que les quatre sous-marins de son dispositif de dissuasion sont basés à l’ouest de l’Écosse.

En cas d’indépendance, les Écossais ont annoncé qu’ils refuseraient de conserver cet arsenal. Le coût d’un démantèlement et d’un déplacement en Angleterre s’élèverait à 10 milliards d’euros, soit le quart du budget annuel de l’armée. Et la reconstruction d’une base et d’infrastructures devraient gonfler l’addition. De quoi tenter Londres de laisser tomber son statut de puissance nucléaire, ou du moins d’ouvrir le débat.

Le Royaume-Uni a été la troisième puissance à se doter de l’arme nucléaire après les États-Unis et la Russie, alors que débutait la guerre froide. Mais les temps ont changé, d’autant que la flotte britannique est vieillissante. Son renouvellement, qui devrait être débattu en 2016, prévoit déjà de ne remplacer que trois des quatre sous-marins. Cela pour 22,7 milliards d’euros !

Mais comme le souligne Alan West, l’ancien chef de la marine britannique entre 2002 et 2006 : « Les Américains apprécient que nous soyons une puissance nucléaire. Cela poserait des problèmes avec eux. Au sein de l’OTAN, cela provoquerait une inquiétude. Peut-on vraiment rester un membre permanent du conseil de sécurité ? Je ne sais pas. »

L’administration de Barack Obama s’inquiète en effet de l’affaiblissement de l’un des ses principaux alliés, alors que la situation au Moyen-Orient est de plus en plus critique et que les tensions sont toujours vives avec la Russie, un autre membre du conseil de sécurité permanent de l’ONU.

La remise en question de la puissance nucléaire britannique pourrait d’ailleurs être utilisée par les pays onusiens qui militent contre le pouvoir des membres du conseil et aimeraient avoir plus de poids dans les décisions de l’instance internationale.

Mais Londres a encore des atouts dans sa main

Tout cela dépend évidemment des résultats du référendum. Personnellement, je pense que le non va l’emporter : en 1995 au Québec, des études ont révélé que la crainte de l’inconnu avait pesé plus que prévu au moment du vote.

Par ailleurs, même en cas de vote positif, le gouvernement britannique dispose encore de cartes à jouer. Si le Yes gagne, une période de deux ans doit encore mener l’Écosse vers l’indépendance. Elle sera utilisée pour négocier de nombreux points. Si les indépendantistes peuvent s’appuyer sur la répartition des ressources de la Mer du Nord ou sur la présence de l’arsenal nucléaire anglais, le Royaume-Uni dispose d’un pouvoir très important sur la question monétaire. Les Écossais veulent conserver la livre sterling puisque le pays fait l’essentiel de ses échanges commerciaux avec le Royaume-Uni mais aussi car il bénéficie de la protection de la Banque d’Angleterre. L’adoption de l’euro ne serait pas bénéfique alors que l’Écosse devrait respecter les contraintes budgétaires de Maastricht. Or les indépendantistes veulent au contraire être libres de mener leur propre politique budgétaire, choisir leur taux d’imposition, dépenser selon leur souhait…

Même en cas de victoire du Yes, le Royaume-Uni aura de sérieux atouts à faire valoir.

Crédits photos : Captures du film Braveheart 

 

Pour une fois, on va plutôt défendre un politique !

Après Montebourg et Thévenoud, un autre ministre fait des remous. Mais à la différence de nos deux autres amis, on ne va pas cette fois enfoncer Emmanuel Macron.

Pour ceux qui ne sont pas encore au courant, le ministre de l’Économie a légèrement dérapé ce matin à l’antenne d’Europe 1 en évoquant le cas des salariés de l’abattoir breton Gad, dont les 850 emplois sont menacés : « il y a dans cet abattoir une majorité de femmes, il y en a qui sont pour beaucoup illettrées ! On leur explique qu’elles n’ont plus d’avenir à Gad et qu’elles doivent aller travailler à 60 km ! Ces gens n’ont pas le permis ! On va leur dire quoi ? Il faut payer 1.500 euros et attendre un an ? Voilà, ça ce sont des réformes du quotidien, qui créent de la mobilité, de l’activité ! »

En évoquant la réforme du permis de conduire sur laquelle planche le gouvernement, le ministre prend l’exemple de salariées qui sont handicapées par le fait de ne pas savoir lire et ne peuvent donc pas passer le permis. Pour sa première interview, il est vrai que cette phrase est assez mal tournée : apparemment, le beaucoup est de trop. Mais il y en a un peu : selon Europe1, 20% des salariés de Gad étaient illettrés en 2013.  Si Macron prend cet exemple, c’est bien que quelqu’un a évoqué ce problème avec lui.

« Mal-lisant » ou « Non-lisant », c’est mieux là ?

Il dit quelque chose de totalement sensé et met en avant un problème concret. C’est trop dur à comprendre pour ces Français tellement habitués à la langue de bois, qu’ils s’étouffent au premier mot « offensant » ? Il existe peut-être un mot à la con pour remplacer illettré, un « non-lisant » ou un « mal-lisant », dans la lignée des termes qui ont remplacé sourd ou aveugle. Heureusement, Macron, qui est quand même marié avec sa prof de français, n’en est pas à ce point là !

Bref. Puisque le moindre écart doit devenir une affaire, tout le monde a occulté la problématique du permis de conduire pour se concentrer sur le « mépris » et la « suffisance » de Macron. Sur Twitter, il suffit de taper les mots clefs de l’affaire pour voir des tweets hallucinants, appelant même parfois le ministre à démissionner. Je pense que beaucoup de gens qui écrivent sont -mal- politisés : militants, cadres d’un parti ou même élus. Franchement, ça fait vraiment flipper sur l’état de notre pays.

 

Des polémiques inutiles occultent les sujets importants. Au lieu de parler de Cambadélis, les gens ne parlent que de ça. Et au lieu de se concentrer sur son job*, le ministre a été contraint de présenter ses « excuses les plus plates » devant l’Assemblée lors des questions au gouvernement : « Je prenais cet exemple précisément parce qu’il est une injustice exemplaire, parce que précisément cet exemple de Gad concerne ici plusieurs députés qui se sont battus. »

2,5 millions d’illettrés en France !

Très propre et très classe, même si j’aurais préféré qu’il ne s’excuse pas.

Car avec 2,5 millions d’illettrés en France selon l’INSEE, le ministre n’a pas à s’excuser. Derrière les 20% de Gad, se cache les 7 % de la population (de 18 à 65 ans et scolarisée en France) qui sont en situation d’illettrisme. Soit seulement deux points de moins qu’il y a dix ans. 51% des personnes en situation d’illettrisme ont un emploi. C’est pour ces chiffres et non pas pour un mot qu’il faut s’alarmer !

L’illettrisme, pour ceux qui l’ont oublié, était la grande cause nationale 2013. Alors ceux qui parlent de mépris et du fait qu’Emmanuel Macron ne connaît pas la réalité du terrain devraient y penser à deux fois avant de la ramener : quand on fait une interprétation aussi éloignée de la réalité, c’est aussi une autre forme d’illettrisme.

* Macron recevait aujourd’hui les huissiers, dans le cadre de la réforme des métiers réglementés. C’est d’ailleurs ce sujet qui l’amène à évoquer ce matin le permis de conduire à 7mn50 dans la vidéo ci-dessus.